Correct ! — aux adeptes de la pensée rectifiée

Quand on en aura fini avec le « politiquement correct », mais aussi avec le sociologiquement, historiquement, philosophiquement et autres hoquètements correctement persistants soumis aux décrets imposant une rectitude de la pensée, on cessera par la même occasion de s’étouffer ou de s’étrangler soi-même avec ce sirupeux poison des bien-pensants qui, à l’usage, se révèle des plus dangereux pour son hygiène personnelle ; en tout cas clairement inefficace, et même contre-indiqué si l’on ne veut pas sombrer dans le petit jeu des mégalomanes cyniques, de plus en plus nombreux à nous diriger, que ce soit en privé (dans l’industrie ou les médias), ou par une élection démocratique prétendument libre. Que peuvent en effet deux visions totalitaires qui s’affrontent sans y rien comprendre l’une à l’autre, sinon faire résolument office de repoussoirs, ce qui est peut-être la meilleure façon de s’écarter de ces voies sans issue ?!

À moins que nous ne cherchions dans ces sortes de contraintes — sans vouloir le savoir évidemment ! — une ultime protection contre l’éternel désespoir et le définitif abandon aux affres du néant. Mais de tels programmes d’occupation, qu’ils soient élaborés par les cyniques ou par les bien-pensants, il vaut mieux réaliser qu’il ne peut être question de sortir indemne.

Il est aussi tout simplement possible de réaliser que la libre pensée ne se décrète pas, mais qu’elle se conquiert.

Qu’on se le dise ! Ou pas.

P.S. Précision. J’ai eu l’occasion de signaler dans un écrit récent que l’entrée en force du « genre » comme plus politiquement et sociologiquement « correct » que le sexe correspondait à deux bénéfices extraordinairement puissants qui en ont facilité l’accès dans notre société régressive : ne pas entrer dans la profondeur de la sexualité accomplie et de ses tabous persistants, soit rester à la plus superficielle des surfaces sociétales, et, plus encore, ignorer les conflits incontournables de l’existence tout en les entretenant, conflits présents dans toute relation et qui tiennent à l’incomplétude et au manque inhérents à notre humaine condition, loin donc de la fuite par la stérile autarcie libidinale. Je précise maintenant que, en outre, lesdits bénéfices expliquent suffisamment qu’il ne soit pas question de seulement toucher à cette nouvelle donne, ni même d’en discuter ouvertement et publiquement sans tomber sous le coup de l’opprobre et de l’oppression. Empêcher avec la plus énergique résistance de voir ressurgir ce qui a été refoulé, c’est là la loi de la censure pour laquelle, en l’occurrence, on trouve sans surprise la foule de souscripteurs des grands jours.