L’année calendaire qui s’achève peut être qualifiée de virale aux sens propre et figuré. Imprégnée du virus physique qui nous occupe constamment, celui-ci continuera sans doute encore dans la suivante à se répandre dans nos pensées, nos représentations et nos conversations, telle une traînée de poudre. À l’exclusion des autres préoccupations sanitaires dont on ne parle plus, et encore pour ne s’arrêter que sur la santé puisque presque tout le reste s’est effacé devant elle, cette viralité a bousculé nos routines et nos vies quotidiennes.
C’est bien sûr compréhensible pour les personnes sérieusement atteintes, pour celles qui s’en occupent et pour celles qui en subissent des conséquences existentielles, ce qui représente pas mal de monde mais en réalité une minorité d’entre nous. Pour tous les autres qui en parlons constamment en laissant de côté tout ce qui sort des routines et tout ce qui concerne autre chose que les questions de santé, faisant comme s’il s’agissait d’un état d’exception, n’est-ce pas une aubaine pour continuer à ne pouvoir s’occuper du reste : peur de « toutes » les maladies et de la mort, guerres chaudes ou froides sur la surface du globe, famines meurtrières largement répandues, exploitation de l’homme par l’homme dans toutes sortes de rapports de force comme principe de coexistence, destruction de celui-ci par celui-ci ainsi que de sa planète ?
Cela se passe comme s’il y avait là enfin une bonne raison qui ne nous couvre pas le reste du temps où nos routines et nos vies quotidiennes demeurent désespérément, envers et contre tout, notre seul et unique horizon. Je n’ai pour ma part guère entendu parler à ce jour de cet effet anesthésiant de la viralité, qui ne l’est du reste pas plus que n’importe quoi d’autre qui aurait pu servir la même cause et que nous trouverons à la prochaine occasion, on peut en faire le pari au passage (de la nouvelle année).
S’il y a donc quelque chose à souhaiter pour les temps à venir, c’est un peu de réflexion, de prise de conscience et d’action correspondante sur les plus importants défis qui n’en continuent pas moins d’exister hors de la fuite perpétuelle que nous y appliquons assidûment. Je sais que cela fait un joli programme de travail mais, au fond on le sait tous, l’on n’a rien sans rien.