Les gentils et les méchants

Dans les histoires et dans les films, et cela depuis l’enfance, on aime qu’il y ait des gentils que l’on apprécie d’aimer et des méchants qu’on adore détester. Quand on essaie d’en parler raisonnablement, on dit qu’une telle façon de voir les choses est bonne pour…  les histoires. Dans la vraie vie on prétend plutôt qu’il faut voir, que rien n’est aussi simple, que chacun a des qualités et des défauts, et qu’au total on trouve toujours du bon et du mauvais en soi ; donc qu’on ne peut juger autrui, et même jurer de rien. Ce prudent retour de manivelle, qui vise à rien de moins qu’à préserver des penchants intimes auxquels on ne fait pas trop confiance ainsi qu’à éviter tout conflit avec les dangereux méchants, représente en fait un déni de la réalité qu’on observe autour de soi.

Dans la vraie vie aussi il y a réellement des gentils et des méchants, ceux qui font du bien et qui rendent notre vie meilleure et ceux qui font du mal et qui la rendent pire ou exécrable. Pour parler d’abord des derniers, Donald Trump qui organise des camps de concentration sur le territoire américain en prétendant résoudre un problème de peuplement ou Rodrigo Duterte qui tue et fait tuer des dizaines de milliers de consommateurs sous prétexte d’éradiquer le problème de la drogue sont par exemple des dirigeants qui commettent le pire et font du tort non seulement dans leurs pays mais à notre humanité tout entière, et cela quoi qu’ils fassent par ailleurs. Heureusement il y a les premiers, Carola Rakete qui sauve directement des migrants sinon promis à la mort en mer puisque aucun chef d’état ne veut les accueillir toujours sous de fumeux prétextes ou Edward Snowden qui alerte le monde sur l’utilisation systématique de nos données personnelles par les entreprises privées et les états pour nous contraindre et nous diriger sont de façon également exemplaire de bonnes personnes qui font du bien non seulement dans leur domaine mais à notre humanité tout autant, là encore quoi qu’ils fassent en dehors.

C’est là la réalité du monde dans lequel nous vivons, où les uns et les autres nous aident à aller dans le meilleur ou dans le pire, ce qui n’existe pas que dans l’engagement du mariage, mais à quoi l’on doit faire face dans tous les domaines de nos existences, d’hommes, de femmes, de citoyens. Il est donc faux de dire que tout se tient et que l’on trouve au total un équilibre entre qualités et défauts, entre bon et mauvais, et facile de voir que c’est au contraire le déséquilibre qui est la règle. Toutes les violences que l’on subit son existence durant – et contre lesquelles dans le meilleur des cas on s’élève, en privé ou dans la sphère publique – devraient suffire à nous en convaincre.

La soumission bête et méchante résultant d’un regard frileusement détourné, personne ne nous oblige à y adhérer ou à y rester. Il faut juste avoir le courage d’en sortir, et réfuter énergiquement les relativistes qui évoquent toujours des conflits d’opinion ou des positions qui peuvent se comprendre. Effectuer ou cautionner des massacres à petite ou à grande échelle, qu’on se le dise, n’a jamais été une opinion, ni une position défendable.

Inspiré par mon épouse Venera que je remercie pour cet éclairage radical et bienvenu