L’utilisation des enfants et des adolescents

L’actualité de la mal nommée pédophilie, puisque celui qui s’y livre n’aime pas les enfants, il les utilise pour se satisfaire dans le cadre de sa propre immaturité sexuelle et des déviances qui en résultent, cette actualité donc nous parvient notamment par des hommes ou des femmes qui ont le courage de témoigner de ce qu’ils ont subi dans leur jeunesse. Que ce soit dans les milieux institutionnels ou privés, ces témoignages nous éclairent sur certaines formes de cette violence. Celle-ci peut se traduire par de l’influence et de la suggestion de la part de l’abuseur, en particulier auprès des adolescents, ne prenant pas alors le visage agressif que nous attribuons habituellement à la violence. C’est ce qui rend l’abuseur, dans ce cas, particulièrement manipulateur. C’est aussi ce qui lui permet de parvenir à ses fins tant que la maturité de l’âge adulte n’est pas atteinte par les jeunes concernés.

J’avais il y a quelques années écrit un bref essai à ce propos, Le crime du pédophile, où j’abordais cette question de l’abus sur l’adolescent, dans un contexte de séduction d’une classe de collège par un enseignant pédophile qui avait été porté à ma connaissance. Les jeunes défendaient cet individu, sa prétendue liberté, et la leur par la même occasion, se liguant dans la lutte contre le rejet de l’institution et de la société, notamment contre l’opprobre qui couvre la sexualité et ses tabous. Quant à la direction de l’institution, elle était dans le flou et l’ambivalence, traduisant certains courants dans la société qui ont justifié cette mise au point visant à combattre un risque de banalisation. Je crois avoir mis en évidence de façon convaincante les circonstances dans lesquelles prend place ce mécanisme d’influence et de suggestion. J’en parle aujourd’hui puisque, hélas ou heureusement, cela apparaît toujours d’actualité. Hélas car cela existe encore, et heureusement car on en parle enfin.

Si de tels passages à l’acte sont dangereux pour la personne humaine, pour le groupe social et pour la civilisation, combien plus le sont ceux qui concernent l’enfant plus jeune ou le tout petit enfant, totalement démunis par l’emprise de l’adulte, sous quelque forme qu’elle se manifeste. Qu’il s’agisse d’enfants ou d’adolescents, c’est quoi qu’il en soit là que les combats les plus importants pour la dignité humaine devraient être portés de nos jours, davantage que dans le cas des violences entre adultes, qui ont d’autres moyens à faire valoir pour se défendre. Mais il s’agit, pour cela, de lever des tabous singulièrement plus puissants, même si les diverses formes de la violence remontent toujours par une voie ou une autre à des épisodes précoces de l’existence que l’on préfère en général ignorer.

Je signalais dans mon essai, pour conclure, que toute tolérance à cet égard ne pouvait relever, plus encore que de la seule non assistance à personne en danger, d’un encouragement par défaut adressé à de futurs criminels, à l’encontre de futures victimes. Espérons que cela soit en train de changer durablement.